L’Alsace, Elle attend.

Ce petit tableau est une copie de la main de Henner, dédicacée à l’encre sur la toile à Madame Scheurer-Kestner. Cette jeune Alsacienne en costume de deuil semble interpeller le spectateur par son regard farouche et triste. L’original, offert en 1871 par un comité de dames de Thann à Léon Gambetta, a été commandé à Jean-Jacques Henner. Avec une grande économie de moyens, le peintre réussit, par la position des mains et la lumière qui se dégage du visage, à exprimer l’amertume et l’attente de l’Alsace face à la France. Cette image aura rapidement la valeur d’une icône républicaine. Léon Gambetta, réalisant la puissance évocatrice du tableau, l’a aussitôt fait graver par Léopold Flameng pour en favoriser la diffusion. Sur un exemplaire qu’il a dédicacé à Madame Kestner, instigatrice du présent, il proclame: « Si je pouvais perdre de vue une seule minute le but auprès duquel tous les autres ne sont rien, cette image sacrà©e et le souvenir des nobles femmes qui me l’ont offerte comme une perpétuelle exhortation, me rappelleraient un devoir… ». Ce symbole a quelque chose de nouveau. L’Alsace n’est pas personnifiée par une divinité abstraite à l’antique, mais par le portrait bien réel d’une jeune femme coiffée du noeud « alsacien » dont le caractère typique s’affirme lentement depuis le premier quart du XIXème siècle. Cette représentation a connu, sous toutes les formes, une énorme diffusion à travers le monde. Le Musée des Beaux-Arts de Mulhouse présente la plus importante collection Henner de province. Cette acquisition rentre donc naturellement dans la politique d’enrichissement de ce fonds. Jean-Jacques Henner: Bernwiller (Alsace), 1829-Paris, 1905.