Les Larmes de saint Pierre

© Musée départemental Georges de La Tour, Vic-sur-Seille / photo F. Doncourt

Domaine : Beaux-Arts

Titre : Les Larmes de saint Pierre

Auteur / Exécutant : D’après Georges de La Tour (atelier du peintre ?)

Date : Vers 1646-1648

Matière et technique : Huile sur toile

Dimensions : Longueur :    Largeur : 85   Hauteur : 107   Diamètre :   

Musée : Musée départemental Georges de la Tour – Vic-sur-Seille (57)

Numéro d'inventaire : Inv. DV 2018.2.1

Descriptif

Ce tableau est exposé au Musée départemental Georges de La Tour de Vic-sur-Seille depuis 2018 grâce à un dépôt d’une collection particulière.

En 1966, l’historien de l’art René Crozet attire l’attention sur cette œuvre qui était conservée depuis plus d’un demi-siècle dans la collection particulière d’une famille française. Un an après, le spécialiste de l’art lorrain, François-Georges Pariset, la fait connaître à la Société de l’histoire de l’art français et la publie sous le titre Ermite priant dans une grotte. Toujours propriété de particuliers, grâce à la générosité de ces derniers, le tableau est aujourd’hui en dépôt au Musée départemental Georges de La Tour à Vic-sur-Seille.

Après une comparaison avec d’autres toiles et copies de Georges de La Tour, le sujet de l’œuvre a pu être mieux cerné. L’ermite est désormais identifié comme étant un saint Pierre en plein repentir après l’épisode de son reniement. Selon l’Évangile de Marc, dans le récit de la Passion, l’apôtre considéré comme la pierre angulaire sur laquelle le Christ voulait bâtir son Église lui avait en effet juré fidélité, malgré la prédiction du Nazaréen : « Avant que le coq ne chante deux fois, tu m’auras renié trois fois. » Les mains jointes dans un geste à la fois de supplique et de souffrance, saint Pierre prend conscience ici de l’accomplissement de la prophétie le concernant et de sa trahison envers le Christ. Les yeux fixes tournés vers la lumière, la bouche ouverte en prière silencieuse, le saint semble chercher le dialogue avec Dieu dans une attitude de profonde contrition. La lanterne qui éclaire la scène, posée sur la table à hauteur de sa poitrine, est la même qui révèle à Irène les blessures de saint Sébastien dans les nombreuses copies regroupées sous le titre de Saint Sébastien à la lanterne.

Le thème du repentir semble avoir été un sujet de prédilection pour Georges de La Tour qui a aussi figuré des Madeleine et des saint Jérôme pénitents, notamment dans la seconde partie de sa carrière, sans doute en lien avec le regain de religiosité que connaît la Lorraine après les destructions de la guerre de Trente Ans (1618-1648). La personne du premier évêque de Rome a également beaucoup suscité l’intérêt du peintre :  en plus de trois versions connues des Larmes de Saint Pierre, plusieurs toiles représentent l’apôtre, comme la copie du Saint Pierre du musée Toulouse-Lautrec à Albi où l’on retrouve la même contorsion des mains que dans l’œuvre en dépôt à Vic-sur-Seille, celle du Reniement de Saint Pierre conservée au musée d’Arts de Nantes, ainsi que la reproduction gravée d’un Saint Pierre repentant dont on sait que l’original appartenait en 1659 à l’archiduc Léopold-Guillaume. Les archives évoquent également un autre tableau, « l’image Saint Pierre », acquise en 1624 par le duc Henri II de Lorraine.

Des analyses réalisées au Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France ont montré que ces Larmes de Saint Pierre étaient une copie ancienne, de très bonne facture, d’un original conservé au musée de Cleveland, dans l’Ohio aux États-Unis. Mais les deux toiles présentent des dissemblances : celle de Cleveland a un cadrage plus distant, avec le saint représenté dans son entièreté et une attention particulière donnée aux sandales très détaillées. La lanterne est au sol, remplacée sur la table par un coq à l’allure humble. Au-dessus de l’animal, une branche de lierre rompue pend depuis le plafond, rare plante que peint ici La Tour, incarnant la fidélité brisée. Cette toile originale est signée et datée de 1645, ce qui laisse à penser que la copie exposée au musée de Vic-sur-Seille aurait été réalisée dans les années 1646-1648, dans un style plus sobre, plus dépouillé et plus géométrique qui correspond à la maturité artistique du peintre. Jacques Thuillier l’associe ainsi à La découverte du corps de Saint Alexis, appartenant au Musée lorrain de Nancy et déposée à Vic-sur-Seille, très proche stylistiquement. Il indique également qu’il pourrait s’agir d’une œuvre d’Étienne de La Tour, fortement inspirée du travail de son père.

Juliette La Burthe

Bibliographie

- THUILLIER (Jacques), Georges de La Tour, Paris, éd. Flammarion, 1992, p. 200-201, p. 291, n° 58, p. 293, n° 68.
- BONFAIT (Olivier), REINBOLD, (Anne), SARRAZIN (Béatrice), L’ABCdaire de Georges de La Tour, Paris, éd. Flammarion, 1997, p. 76-78.
- CUZIN (Jean-Pierre) et ROSENBERG (Pierre) (dir.), Georges de La Tour [cat. exp., Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 3 octobre 1997 – 26 janvier 1998], Paris, Réunion des musées nationaux, 1997, p. 225 et 254.